À deux jours d’un scrutin à forte charge symbolique, près de 850 000 électeurs gabonais sont attendus aux urnes ce samedi 12 avril pour désigner celui qui incarnera le retour à l’ordre constitutionnel, près de vingt mois après le renversement d’Ali Bongo Ondimba et plus de 50 ans de règne sans partage de la famille Bongo.
Dans cette élection à un tour, Brice Clotaire Oligui Nguema, présidetnt de la transition et figure centrale du coup d’État du 30 août 2023, apparaît comme l’incontestable favori. Reste à savoir si ce rapport de force annoncé traduit une véritable adhésion populaire… ou une dynamique verrouillée.
La présidentielle de ce 12 avril revêt une dimension particulière : elle constitue l’ultime étape d’une transition politique entamée par la chute de l’ancien régime. À sa tête, Brice Clotaire Oligui Nguema, qui s’est imposé depuis comme l’homme fort du pays, incarne désormais la volonté de « reconstruire » un État fragilisé par des décennies de gouvernance controversée. En se présentant à cette élection, il ambitionne d’obtenir non seulement la légitimité des urnes, mais aussi l’adhésion formelle d’un peuple dont il s’est érigé en porte-voix depuis la prise de pouvoir.
Porté par le « Rassemblement des bâtisseurs », son mouvement politique qui a rallié à lui une grande majorité d’acteurs sociaux, économiques et politiques, le président-candidat bénéficie d’une dynamique quasi hégémonique. Associations, syndicats, figures religieuses, chefs coutumiers… Peu de sphères de la société semblent échapper à son influence et c’est un euphémisme. Pour le chercheur Bergès Mietté, « Brice Oligui Nguema a su fédérer la quasi-totalité des forces vives du pays, ce qui renforce l’image d’un scrutin sans réel suspense ».
Face à ce rouleau compresseur, les sept autres candidats peinent à exister. Plusieurs figures attendues ont renoncé ou n’ont pu se présenter, réduisant d’autant les marges de manœuvre de l’opposition. Seule véritable figure d’envergure dans cette compétition, Alain-Claude Bilie-By-Nze, dernier Premier Ministre d’Ali Bongo, se pose en « candidat de rupture ». En tentant de se détacher de l’héritage du Parti Démocratique Gabonais, il se veut l’alternative au discours de reconstruction prôné par le président sortant. Mais ses chances de percer dans une campagne dominée par l’ombre omniprésente d’Oligui restent hypothétiques.
Si Brice Clotaire Oligui Nguema est très clairement en position idéale pour transformer son leadership de transition en pouvoir institutionnaliser, la présidentielle du 12 avril reste un moment de vérité pour le Gabon. Loin d’être un simple couronnement, elle pourrait s’avérer être un test de maturité démocratique… ou de contrôle politique maîtrisé.